Fin mars, «BASKET, LE MAG» a passé une semaine à Salt Lake City, la capitale de l’Utah, la ville du Jazz. L’occasion de constater la popularité de Rudy Gobert (2,17 m, 24 ans) sur place et de comprendre pourquoi la franchise construit autour de lui et ambitionne de faire du Français son image.

Par Yann CASSEVILLE, à Salt Lake City

L’un des meilleurs lycéens de l’Utah s’appelle Stockton Malone Shorts. Prénom, Stockton, deuxième prénom, Malone, et nom de famille, Shorts. Il est né à l’automne 1998. Le Utah Jazz sortait de deux finales NBA, perdues face aux Chicago Bulls de Michael Jordan. «John Stockon et Karl Malone nous ont mis sur la carte. Ils sont l’image de la franchise, et pour beaucoup d’entre nous, à l’origine de nos meilleurs souvenirs du Jazz», dit Justin Jasperson, un fan de longue date de l’équipe, qui avait 17 puis 18 ans en 1997 et 1998. «Quand on parle à différents fans, c’est souvent : on est super fans du Jazz depuis l’époque de John Stockon et Karl Malone», raconte Boris Diaw, arrivé cette saison dans l’équipe. Stockton-Malone,  le meneur passeur et l’intérieur scoreur, un duo légendaire. Indissociable. Joueurs, ils furent co-MVP du All-Star Game 1993. Aujourd’hui, ils ont chacun leur statue devant l’arena de la franchise, et juste à côté, même une route à leur nom. Les deux routes se croisent, évidemment.

22 mars 2017. Vingt années ont passé depuis la première finale du Jazz, aussi pour l’occasion la franchise a réuni la plupart des membres de cette épopée pour une journée de célébrations. Malone a fait faux bond – officiellement pour des travaux dans sa maison – mais l’emblématique coach Jerry Sloan, John Stockon, Bryon Russell ou encore Greg Ostertag ont répondu présent. Le soir-même, pour le match Utah-New York, les anciens héros sont honorés. Un fan brandit une pancarte avec les têtes de Gordon Hayward et Rudy Gobert ainsi legendée : «History will repeat». L’histoire va se répeter. Vingt ans après l’iconique duo Stockton-Malone, une franchise et ses fans espèrent retrouver les sommets grâce à Hayward, un ailier longtemps sous-coté, et Gobert, le pivot français drafté en 27e position.

Très apprécié en ville

Dans la boutique officielle de la franchise, juste à côté de l’arena, où figurent de nombreuses séries de t-shirts, casquettes et souvenirs divers, le maillot de Boris Diaw n’est pas disponible. Aucun problème : des employés en floquent un, en quelques minutes seulement. À la caisse, la vendeuse nous indique que les produits qui partent le plus vite sont ceux de Gordon Hayward. Dans l’Utah, un état qui compte plus de 85% de Blancs parmi ses trois millions d’habitants et qui est le point central de l’église mormone, Hayward, avec ses cheveux blonds, sa tête de gendre idéal, a tout du choucou. Sportivement, nouveau All-Star, meilleur marqueur de l’équipe, il est le «leader» du Jazz, dixit Rudy Gobert. Pour autant, le Français aussi a la cote. De plus en plus. 

«Mon statut a changé ici. J’ai l’impression que tout le monde me connaît à Utah, bien plus qu’en France. Quand je me balade en France, pour la plupart des gens, ils voient juste que je suis grand, ils ne me connaissent pas, ils vont se dire qu’ils m’ont déjà vu quelque part mais c’est tout, ils ne vont pas savoir mon nom ou quoi que ce soit, alors qu’ici, ils savent vraiment qui je suis.»

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Parlez-en à Valter, le chef italien qui tient un restaurant à Salt Lake City, la capitale de l’Utah, où sont situées l’arena et les installations de la franchise. À l’entrée de son établissement, passage régulier des équipes NBA lors de leurs déplacements, le chef s’affiche en photos avec Gregg Popovich ou encore Stephen Curry, et confie que Rudy Gobert fait partie de ses clients réguliers. En cette soirée de mars, à peine une tablée de clients français a-t-elle expliqué qu’elle vient sur les recommandations de Gobert que le serveur file en cuisine, et dans la foulée apparaît Valter, l’exubérant patron, qui serre la main de chacun, dit quelques mots en français et se lance dans un show, feignant d’inventer un menu spécial pour l’occasion et appelant plusieurs de ses serveurs à s’occuper avec le plus grand soin de cette table. Valter ne veut pas décevoir Gobert.

Fin avril, pour fêter le retour du Jazz en playoffs,  chez trois coiffeurs de la ville la coupe était gratuite – réglée par la franchise – pour tout client demandant la coiffure d’Hayward ou de Gobert. Les soirs de matches à la Vivint Arena, la présentation du 5 majeur vaut en partie pour entendre une avalanche de grondements qui descendent des travées, comme si les fans huaient l’un des leurs. En réalité, ils acclament Gobert, à leur façon : «Ruuuuu !» (prononcez «wou»). «Hayward a vraiment haussé son niveau cette année mais j’ai l’impression qu’il n’est pas assez leader vocal. Quand Rudy était rookie et ne jouait que quelques minutes, quand il entrait sur le terrain et réussissait un dunk ou un contre, on voyait son émotion, on voyait qu’il avait du feu en lui. Il pourrait être le leader vocal donc cette équipe a besoin, et l’image de cette franchise», estime Justin Jasperson.

Le pivot français, grâce à sa prolongation de 102 M$ (96 M€) sur quatre ans paraphé à l’automne dernier, touchera plus de 21 M$ (20 M€) la saison prochaine. Le plus haut salaire de l’histoire du Jazz, effaçant des tablettes les 19,3 M$ de Karl Malone en 2002-03….

Retrouvez l’intégralité de cet article dans le numéro 8

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