26 points, 10 rebonds, et surtout les paniers décisifs pour assurer la victoire française contre l’Allemagne. L’arrière revient sur sa belle performance, son leadership au sein des Bleus, la révélation Amath M’Baye ou encore l’apport du banc.

 

Propos recueillis par Yann Casseville, à Shenzhen (Chine)

 

Contre l’Allemagne, vous avez encaissé 20 points en première mi-temps et 54 en deuxième. Quel regard portez-vous sur la défense française ?

Quand tu analyses notre match, déjà, on fait un très bon premier quart et un très bon début de troisième quart. Les points que l’on se prend, ce sont principalement sur nos erreurs, des choses que l’on peut contrôler : le rebond et les pertes de balle. Notre défense sur demi-terrain a été très, très forte. Leur pourcentage sur demi-terrain, sur attaque placée, est très mauvais.  C’est une de nos forces. Maintenant, on sait qu’il faut qu’on gère mieux la balle pour ne pas leur donner des points faciles. Parce que sur demi-terrain, c’est difficile de marquer contre nous.

Vincent Collet a reconnu que l’apport du banc avait été limité. Un point-clé à revoir pour aller loin dans la compétition ?

On veut que notre banc joue du mieux possible. Les gars ont fait du mieux qu’ils pouvaient, ils sont passés à côté de leur match hier. Un gars comme Nando (De Colo), on sait qu’il ne devrait pas faire des matches comme ça tous les soirs. À la limite, c’est plutôt positif. Non, je ne suis pas du tout inquiet par notre banc. On a un banc qui est très compétitif. Et il y a eu des bonnes rentrées d’ailleurs, je pense à Frank (Ntilikina) notamment. Mais sur la compétition, c’est clair qu’on aura besoin de notre banc pour aller loin. On a tous confiance, le staff, les starters, on sait qu’ils sont forts et qu’ils vont nous apporter durant cette compétition.

Evan Fournier, étincelant et décisif face à l’Allemagne avec 26 points et 10 rebonds.

À l’inverse, Amath M’Baye, titulaire au poste 4, a battu son record en Bleu avec 21 points. Les Allemands ont semblé surpris par sa performance. Et vous ?

Non, pas du tout. C’est quelqu’un qui a joué sur ses qualités premières hier. Ils ont clairement voulu anticiper et aider sur tous les drives des extérieurs, et Amath les a fait payer. C’est quelque chose qu’on attend de lui, quelque chose dont on sait qu’il est capable. Il l’a fait par séquences en préparation. Là, je pense que ça lui a fait du bien, sur un premier match, de voir son premier tir rentrer. Après, il s’est lâché derrière, et ils ne se sont pas ajustés. Il leur a fait très mal.

Il a un parcours atypique, ayant quitté la France très tôt. Il a rejoint l’équipe de France pour les fenêtres  en novembre dernier, dans sa 29e année. Comment s’est-il intégré dans le groupe ?

Il connaissait déjà plusieurs joueurs parce qu’il avait fait les fenêtres. Nous (les joueurs NBA et Euroleague), quand on est revenu dans le groupe, à la limite c’était à nous de nous adapter, parce qu’ils se connaissaient tous des fenêtres. Et tu sens qu’ils ont créé un truc ensemble en jouant. C’est bien d’ailleurs, c’est un des côtés positifs des fenêtres. Mais sinon, de toute façon, en équipe de France, l’adaptation est très simple.

Amath M’Baye, auteur de 21 points face à l’Allemagne. Son record en Bleus, dès son premier match en Coupe du monde.

Quant à vous, personnellement, vous avez été l’atout offensif majeur, inscrivant 26 points, avez battu votre record avec 10 rebonds, et surtout avez inscrit un panier décisif et les lancers qui scellèrent la victoire. Votre goût pour les moments décisifs est connu. De quoi cela vient : c’est instinctif, c’est inné ?

Je ne sais pas… (Il réfléchit) Comment résumer ça… Quand tu es gamin, que tu regardes les matches de NBA, que tu vois des tirs au buzzer, et que tu retournes sur le playground, tu imites ça. Dans ta tête, tu fais le décompte, tu fais «3, 2, 1…», et tu tires. Ce sont des moments dont tu rêves quand tu es gamin. Donc quand ça se passe, tu ne calcules plus rien. C’est juste que tu es dans le moment, tu as envie de kiffer, de faire gagner ton équipe, tu as envie de porter ta team, donc ça te pousse à faire des actions que tu ne tenterais pas forcément dans le premier quart-temps.

Les joueurs ne disent que du bien de votre leadership, grandissant dans ce groupe. C’est quelque chose que vous avez travaillé ?

Tu es obligé de faire en fonction de ta situation dans le groupe. En 2015, je n’allais pas avoir le même rôle dans le groupe que maintenant, parce qu’il y avait des gars qui étaient autour, et puis j’avais une position différente, etc. Tu fais en fonction de comment l’effectif est construit. Après, depuis gamin, j’ai toujours été comme ça, ce n’est pas quelque chose qui se force. Je ne pense pas que je sois quelqu’un qui parle beaucoup non plus, c’est juste que quand j’ai quelque chose à dire, je le dis. C’est bien que dans ce groupe, on ait quatre gars comme ça qui aient une voix, que ça vienne de plusieurs personnes. On a vraiment un bon groupe avec un bon leadership.

Fournier est aujourd’hui un vrai patron au sein de l’équipe de France.

Vous affrontez la Jordanie ce mardi. Pensez-vous qu’il faut jouer à fond ou essayer de conserver un peu d’énergie pour la suite ?

Idéalement, oui, ce serait bien de faire jouer les douze, et de pouvoir faire un peu moins jouer ceux qui jouent beaucoup. Mais il ne faut pas que l’on rentre dans cette démarche-là. Il faut que l’on commence le match avec le même sérieux, la même attitude. Surtout qu’historiquement parlant, on sait qu’en équipe de France, on se met souvent au niveau de nos adversaires. C’est des matches à la con, parce que tu ne connais pas l’adversaire. Eux, ils vont donner leur vie, donc il faut rester vigilant.

Qu’avez-vous préparé face à cette nation que la France n’a jamais affrontée ?

Contre ces équipes, c’est plus nous (ce qui compte). Comment on aborde le match, comment on joue. Après, j’ai cru comprendre qu’ils avaient un intérieur qui a fait un carton hier (il s’agit de Ahmet Duverioglu joueur de Fenerbahçe, qui se fait appeler Ahmad Al-Dwairi avec la Jordanie). Voilà, c’est à peu près tout ce qu’on sait. Ce sont des joueurs que l’on ne connaît pas. Le focus est sur nous.