À 26 ans, Paul Lacombe a franchi un palier. Son évaluation, de 5,5 en carrière, affiche presque 14 cette saison. L’arrière de Strasbourg évoque son évolution, son statut de sixième homme, sa relation avec Vincent Collet, et pousse un coup de gueule au sujet des coupes d’Europe.

 

Propos recueillis par Yann CASSEVILLE

Vous êtes né à Vénissieux, près de Lyon. Devenir pro à l’ASVEL était un rêve ?

Oui. Déjà, de par mes parents, mes oncles et tantes, le basket est une histoire de famille. Et l’ASVEL, à Lyon, c’est le club où tout gamin veut aller, comme la SIG à Strasbourg ou Pau dans sa région. En plus, pour moi, c’était dans les années 90, une époque où l’ASVEL dominait le championnat, avec Greg Beugnot, Delaney Rudd.

 

Jusqu’à l’entrée dans le monde pro, votre parcours a suivi une évolution constante ?

Oui, ça a été linéaire. Et c’est aussi une suite d’événements qui a fait que j’ai eu de la chance. Entre cadet et espoir, il y a un cap à franchir. Dès ma première année cadet, j’étais en cadet France et j’ai pu jouer parce que l’équipe était très faible. La deuxième année, comme l’équipe espoir n’était pas très forte, ça m’a permis de jouer tous les matches en espoir. Il y a des hommes qui m’ont fait confiance, notamment Skeeter Jackson et Nordine Ghrib. J’ai aussi eu la chance que Vincent (Collet) soit le coach pro à l’époque, c’est lui qui m’a permis de basculer en pro. Je n’étais pas le plus fort de ma génération, loin de là, mais j’ai su provoquer la chance.

 

À vos débuts, vous étiez parfois brouillon. La fougue de la jeunesse ?

C’est aussi ce qui me représente dans ma vie, dans mon quotidien. Précipiter un peu les choses, c’est dans ma nature. La maturité joue un grand rôle à ce niveau, et ce qui m’a beaucoup aidé, c’est le fait de devenir papa il y a six mois (entretien réalisé mi janvier). Ça m’a fait énormément grandir et ça se ressent beaucoup dans mon jeu depuis la saison dernière.

 

En quoi devenir père change un basketteur ?

On a un autre regard sur la vie. Ça se fait naturellement. Tu es obligé de penser à lui avant de penser à toi. J’ai ma compagne depuis plus de cinq ans, mais c’est une grande personne, elle peut s’occuper toute seule, alors que l’enfant, il faut être à ses petits soins quasiment vingt-quatre heures sur vingt-quatre. C’est aussi une prise en charge par rapport à l’avenir. Espérer le mieux pour lui, dans ma situation cela veut dire essayer de jouer le mieux au basket, et ça passe par plus d’efforts à l’entraînement, plus d’investissement. Aujourd’hui, je joue aussi pour lui. C’est gnan-gnan ce que je dis, bisounours, mais c’est vraiment ça, je me dis qu’il faut que je progresse, que j’aille le plus loin possible, et pas que pour moi.

 

Le titre de champion 2008-09, saison de vos débuts en pro, avec l’ASVEL, figure à votre palmarès. Avec seulement cinq apparitions durant la saison, aucune en playoffs, vous sentez-vous champion ?

Non, pas vraiment. Je suis fier d’avoir été dans cette équipe, parcouru ce qu’eux ont parcouru, parce que quand tu es espoir, tu fais tous les déplacements avec l’équipe – malheureusement je n’ai pas été à la finale parce que je faisais le championnat du monde (U19). Malgré tout, tu n’es pas sur le terrain, ce n’est pas pareil.

 

Rapidement, vous avez dépassé les 15 minutes de moyenne, avant de tomber à 10 minutes et 2,3 d’évaluation en 2012-13, votre dernière saison à l’ASVEL. Comment avez-vous vécu cette stagnation ?

Déjà, j’ai mal vécu que Vincent se fasse couper (à l’automne 2010). On avait une superbe équipe. On perd en demi-finale mais avec lui on aurait pu être champion. Je l’ai aussi mal vécu parce que ma formation n’était pas achevée. Encore aujourd’hui, c’est le mieux placé pour sortir des joueurs tels que moi, qui ne sont pas directement formatés pour être professionnels. Des Nicolas Batum ou Antoine Diot, qu’il a formés, auraient pu s’en sortir n’importe où, mais moi, est-ce que je m’en serais sorti aussi bien s’il n’avait pas été là ? Je ne sais pas. Ensuite, quand Pierre Vincent est arrivé, ça a été compliqué. Le dialogue ne passait pas forcément sur le terrain entre lui et moi. Au début, je rejetais la faute sur lui, et avec le recul, je me dis que j’aurais pu faire plus d’efforts. Mais lui aussi… Je n’ai jamais compris certaines choses qu’il faisait. Par exemple, il a toujours revendiqué que j’étais incapable d’être meneur. Il me l’a toujours dit. En deux saisons, il ne m’avait jamais fait jouer meneur à part un match où il était obligé. Mais le jour où les playoffs sont arrivés, il m’a fait jouer deuxième meneur, 15-20 minutes. Après, au-delà de ça, être à Lyon depuis trop longtemps, avec la famille, les amis autour, je me suis reposé sur des lauriers qui n’étaient pas encore acquis.

 

En 2010-11, l’ASVEL avait d’autres jeunes Français : Léo Westermann, Kim Tillie…

(Il coupe) Une équipe incroyable. Léo, Kim, Edwin (Jackson), Bangaly (Fofana), Théo (Léon)… J’y pense souvent aujourd’hui, je me dis que si on se retrouvait, ça serait une équipe d’Euroleague, peut-être Top 8. Dans le cinq majeur, tu avais Cliff Hammonds, Matt Walsh, Mickaël Gelabale, Davon Jefferson, Pops Mensah-Bonsu… Ça devrait coûter cher aujourd’hui mais waouh, ça a de la gueule !

 

 

Depuis votre arrivée à Strasbourg en 2013, vous avez perdu trois finales consécutives de Pro A. La déception est-elle de plus en plus grande ?

Plus ça va, plus c’est dur. Aujourd’hui, avec six mois de recul sur la dernière finale, je suis fier, j’ai quand même énormément de chance d’avoir pu en disputer trois. L’engouement que ça procure, pour le public, pour nous, c’est exceptionnel. Chaque finale a été différente. La saison dernière, on était tellement destinés à être champion, en plus on menait 2-0. Finalement on perd à la fin. Ça m’a bousillé l’été. J’ai fait mon deuil en revenant à la SIG en août. Il n’y avait plus les mêmes joueurs, le même staff. L’année d’avant, ça avait aussi été super dur. Une saison incroyable, une équipe incroyable, une alchimie d’équipe que je ne reverrai peut-être jamais dans ma carrière… On avait quand même gagné deux trophées (Leaders Cup et Coupe de France) donc ça avait été moins dur que la saison dernière.

 

Qu’est-ce qui a fait défaut ?

Le troisième match. On y est allé en se disant «Il en reste trois», et au final….

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Retrouvez l’intégralité de cet article dans le numéro 6

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